CIV. 1 CB
COUR DE CASSATION
Audience publique du 6 juillet 2011
Rejet
M. CHARRUAULT, président
Arrêt no 798 F-D
Pourvoi no M 10-14.816
Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de M. Dominique Z.
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 28 mai 2010.
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant
Statuant sur le pourvoi formé par Mme Catherine Z, épouse Z, domiciliée Annonay,
contre l'arrêt rendu le 25 mars 2009 par la cour d'appel de Nîmes (chambre civile, chambre 2C), dans le litige l'opposant à M. Dominique Z, domicilié Annonay,
défendeur à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 15 juin 2011, où étaient présents M. Charruault, président, Mme Vassallo, conseiller référendaire rapporteur, M. Pluyette, conseiller doyen, M. Domingo, avocat général, Mme Aydalot, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Vassallo, conseiller référendaire, les observations de la SCP Delvolvé, avocat de Mme Y, de la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat de M. Z, l'avis de M. Domingo, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que Mme Y et M. Z se sont mariés le 14 mai 1980 ; qu'aucun enfant n'est issu de leur union ; qu'autorisée par ordonnance de non-conciliation du 15 octobre 2007, l'épouse a fait assigner son conjoint en divorce sur le fondement de l'article 237 du code civil ; que, par jugement réputé contradictoire du 24 janvier 2008, le tribunal de grande instance de Privas a prononcé le divorce ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches, ci-après annexé
Attendu que Mme Y fait grief à l'arrêt attaqué (Nîmes, 25 mars 2009) d'avoir déclaré recevable, en cause d'appel, la demande de M. Z tendant au versement d'une prestation compensatoire ;
Attendu qu'ayant constaté que M. Z avait formé un appel général contre la décision prononçant le divorce, laquelle n'était pas passée en force de chose jugée, les juges du second degré en ont, à bon droit, déduit que sa demande de prestation compensatoire, formée pour la première fois en cause d'appel, était recevable ; que le moyen, qui vise, dans sa première branche, un motif surabondant, n'est pas fondé ;
Sur le second moyen, ci après annexé
Attendu que le moyen n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six juillet deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par de la SCP Delvolvé, avocat de Mme Y
PREMIER MOYEN DE CASSATION
IL EST REPROCHE À L'ARRÊT ATTAQUE D'AVOIR déclaré recevable la demande de M. Z tendant au versement d'une prestation compensatoire,
AUX MOTIFS QUE M. Z n'avait pas été comparant en première instance et n'avait donc pu exprimer sa demande ; qu'en outre, M. Z ayant formé un appel général, la demande de prestation compensatoire ne constituait pas une demande nouvelle et était recevable dès lors que la décision prononçant le divorce n'était pas passée en force de chose jugée,
ALORS D'UNE PART QUE la demande de prestation compensatoire, accessoire à la demande en divorce, ne peut être présentée pour la première fois en appel si la décision prononçant le divorce a acquis la force de chose jugée ; qu'est sans incidence à cet égard le fait que l'appelant n'ait pas présenté sa demande en première instance faute d'avoir comparu ; qu'en jugeant le contraire en l'espèce, la cour d'appel a statué par un motif inopérant, violant ainsi l'article 564 du code de procédure civile,
ALORS D'AUTRE PART QUE la demande de prestation compensatoire, accessoire à la demande en divorce, ne peut être présentée pour la première fois en appel si la décision prononçant le divorce a acquis la force de chose jugée ; que l'appel formé contre un jugement prononçant uniquement le divorce et par lequel une partie demande, outre la confirmation du prononcé du divorce, la condamnation de l'intimé au paiement d'une prestation compensatoire ne constitue pas un appel général mais un appel limité aux conséquences de cette décision de divorce ; que par suite, dans cette circonstance, la demande de prestation compensatoire formée pour la première fois en cause d'appel par l'appelant est irrecevable ; qu'en l'espèce l'appel formé par M. Z était limité au prononcé d'une condamnation au paiement d'une prestation compensatoire ; qu'il ne constituait donc pas un appel général ; qu'ayant limité son appel contre le jugement de divorce, fondé sur l'article 237 du code civil, à sa demande de prestation compensatoire, M. Z était irrecevable à la former pour la première fois en cause d'appel ; que par suite sa demande de prestation compensatoire était irrecevable ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 564 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION
IL EST REPROCHE À L'ARRÊT ATTAQUE D'AVOIR condamné Mme Y à verser à M. Z une prestation compensatoire de 30.000 euros,
AUX MOTIFS QUE, sur les revenus déclarés, Mme Y versait aux débats différents documents comptables faisant apparaître que si le chiffre d'affaires de son institut de soins esthétiques s'élevant à la somme de 94.038 euros était en progression de 14,5%, le résultat positif de 1.320 euros pour neuf mois était insuffisant pour effectuer des prélèvements personnels sans une dégradation de la trésorerie ; que la société d'experts comptable GEFIREX (pièce 34) indiquait que pour atteindre un objectif de résultat net à hauteur de 15.000 euros, permettant de dégager un salaire mensuel de 1.250 euros, un chiffre d'affaire de l'ordre de 140.000 à 150.000 euros aurait été nécessaire et que la situation actuelle d'activité, au vu des résultats dégagés depuis deux ans, " ne constitue pas un argument en faveur de Madame Y dans l'optique d'un financement bancaire, partiel ou total " ; que le revenu déclaré par Mme Y au titre des bénéfices industriels et commerciaux s'élevait à la somme annuelle de 3.341 euros, selon l'avis d'imposition 2007 ; que, sur les éléments du train de vie de Mme Y, M. Z versait aux débats différents documents entendant démontrer que Mme Y dissimulait certains versements effectués en espèces et que l'épouse avait un train de vie supérieur à ce que les documents comptables et fiscaux révélaient ; qu'ainsi il produisait des relevés d'opérations au nom de Mme Y sur des établissements bancaires étrangers (notamment suisse et espagnol), notamment un ordre de virement de 135.000 francs français le 21 août 1995 au débit du compte de Mme Catherine Y ouvert à la Société de Banque Suisse sur le compte de la Banco Pastor où celle-ci était également titulaire d'un compte ; que Mme Y, qui apparaissait également comme titulaire d'un portefeuille assurance vie auprès de la SOGECAP (épargne de 26.107 euros au 31 décembre 2006), ne fournissait aucun élément pour contredire ou expliquer ce point ; que M. Z versait en outre aux débats diverses factures de bijoux de valeur ou montres au nom de l'épouse (notamment achat d'une montre en or ROLEX en décembre 1993 au prix de 57.248 euros, estimation d'une bague en or sertie de diamants à la somme de 83.390 euros en juillet 2004), des notes d'hôtels et de restaurant de luxe au nom de Y Catherine (hôtel MÉTROPOLE à MONTECARLO en décembre 2005) ; qu'il n'était pas contesté que Mme Y avait subi une opération esthétique s'élevant au coût de 8.450 euros en juillet 2006, opération pour laquelle elle avait souscrit un prêt de 9.000 euros remboursable en soixante mensualités d'un montant de 181,95 euros ; qu'elle ne justifiait pas d'une prescription médicale permettant une prise en charge au moins pour partie par les organismes de sécurité sociale et susceptible d'infirmer la thèse de M. Z selon laquelle cette opération était motivée par les seules considérations esthétiques ; que Mme Y était membre d'un club de golf et versait pour la pratique de ce sport une cotisation annuelle de 796 euros (pièce no44) ; qu'elle ne contestait pas l'affiliation à ce club mais versait une attestation du directeur du golf d'ANNONAY indiquant qu'elle n'avait pas versé sa cotisation pour l'année 2007 ; qu'elle ne contestait pas avoir acquis le 25 février 2006 un véhicule automobile Chrysler pour le prix de 22.500 euros et ne justifiait pas de la provenance des sommes employées pour financer cette acquisition ; qu'il était également versé aux débats un document de déclaration de douane permettant d'établir que Mme Y avait effectué un voyage aux États-Unis le 30 avril 2007, et qu'elle avait effectué un virement de 5.921,50 euros HOLLIWOOD le 16 août 2007 au bénéfice de Mstislav BLONDIN ; qu'elle ne démontrait pas que ces documents de preuve, sur lesquels le nom de Catherine Y ou Catherine ZY apparaissaient, avaient été obtenus par M. Z soit par fraude soit par l'utilisation de procédés déloyaux ; qu'en conséquence, si la cour ne pouvait déterminer que les cahiers de comptabilité rédigés de façon manuscrite révélaient une dissimulation des règlements en espèces, il apparaissait manifeste que le niveau de vie de Mme Y ne correspondait pas au montant des ressources qu'elle déclarait à l'administration fiscale comme provenant de son activité de thalassothérapie et qu'à tout le moins elle n'offrait aucune transparence dans la présentation de sa situation financière réelle ; que compte tenu de l'ensemble des éléments exposés ci-dessus, la disparité dans les situations respectives des parties était caractérisée,
ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, pour apprécier l'existence d'une disparité créée dans les conditions de vie par la rupture du lien conjugal, la cour d'appel, qui avait pourtant relevé le caractère particulièrement modeste des revenus annuels de Mme Y, a retenu de la part de celle-ci une dissimulation de ses revenus ; que toutefois M. Z n'avait jamais fait valoir un tel élément de sorte que la cour d'appel a statué par un moyen relevé d'office sans avoir préalablement recueilli les observations des parties ; qu'elle a donc violé le principe du contradictoire et l'article 16 du code de procédure civile.